La présence, pas le vide ! Méditer, c’est s’arrêter.
Aller en nous-même, là où c’est toujours près de nous.
« Alors l’esprit ne regarde ni en avant ni en arrière. Le présent seul est notre bonheur. » Goethe – Faust II
1. Vivre l’instant présent
Etre en pleine conscience, c’est être dans l’instant présent. Habiter l’instant présent est un acte de libération du passé et du futur, de notre mental, de nos jugements. Nous n’existons ni dans le passé, ni dans le futur, uniquement dans le présent. Méditer en pleine conscience c’est éprouver l’expérience de l’instant présent. C’est voir simplement et comprendre sans mots.
2. Respirer
En se connectant humblement à son souffle, sans le contrôler, mais et en l’accompagnant doucement, permet de se pacifier. Le souffle nous apprend à accepter que nous ne contrôlons pas tout. Ce souffle se fait et se défait sans cesse comme le nuage, le vent…Le souffle, c’est l’ancre de la pleine conscience, qui nous aide à nous amarrer à l’instant présent.
3. Habiter son corps
Notre corps est la porte d’entrée de l’esprit. Nos sensations corporelles témoignent de l’état d’équilibre de notre âme. La pleine conscience recommande de passer en revue toutes les parties de notre corps, pour vérifier que tout est bien, en lui donnant de notre mieux, ici et maintenant, attention, estime, affection. Un corps pacifié permet un esprit éclairé.
4. Fermer les yeux et écouter
Les sons de la nature sont les très vieux sons de nos racines animales. Etre en pleine conscience, c’est revenir à l’écoute neutre et accueillante de la vie, de prendre le son pour le son. Les silences sont tels des respirations, des parenthèses qui nous permettent d’écouter toutes les musiques de la vie.
5. Observer ses pensées
En pleine conscience, nous observons et accueillons les pensées plutôt que de les écouter et les nourrir. Les pensées sont justes des pensées. Etre conscient de la différence entre « je pense » et « je me vois penser » réduit la confusion entre pensées et conscience et accroit la lucidité.
6. Donner un espace à ses émotions
Face à une émotion désagréable, nous pouvons être tenté de fuir, d’agir, de se distraire, de contrôler. Dans la pleine conscience, on accueille les ressentis émotionnels négatifs ou douloureux : on leur permet d’être simplement là. Bien respirer, ne rien vouloir en observant ce qui se passe.
7. Déployer son attention pour accroître sa conscience
La conscience suppose l’éveil. Ressentir et percevoir avec conscience permet du recul par rapport à ce « soi » et d’en observer les mécanismes. L’attention est l’outil de base de la conscience. Sans attention, pas de conscience. Travailler l’attention est à la base de notre efficacité mentale et de notre bien-être. Méditer est comme un entrainement attentionnel à être complètement « dedans », intensément présent à ce que nous faisons, sans mentaliser ou analyser ce qui se passe.
8. N’être qu’une présence
La pleine conscience nécessite de se recueillir. se recentrer, se ré-habiter, se connecter à soi. Elle nécessite le dépouillement de nos attitudes psychologiques : ne pas juger, ne pas filtrer, ne pas s’agripper, ne rien attendre. Elle demande de la sincérité : accepter de manière bienveillante de ce qui est là, ici et maintenant, désengagé de toute forme de désir de réflexion, d’action, de vouloir résoudre, Quitter le « faire » pour l’ « être ».
« Je n’ai rien fait d’aujourd’hui. - Quoi ? Vous n’avez pas vécu ? C’est non seulement la fondamentale mais la plus illustre de vos occupations… » Montaigne – Essais
9. Voir l’ordinaire
Chaque instant de vie est unique, un miracle. Allumons plus souvent l’interrupteur de notre conscience, aimons le banal, le normal pour ne plus être un robot qui a « fait plein de choses » sans avoir vécu, existé, ou même ressenti le fait d’exister. Ne rien faire ? Si : vivre en conscience.
10. Voir l’invisible
Vivre en pleine conscience, c’est prendre le temps de contempler, de se laisser toucher par les objets, par le merveilleux du banal, tel quel. Contempler c’est se contenter humblement de connaître ce qui est, sans vouloir le posséder, l’utiliser ou le juger, ne rester qu’avec l’essence de l’objet sans rien lui demander de plus que sa présence silencieuse.
11. Voir l’important
La pleine conscience nous permet de lutter contre les carences de la lenteur en prenant son temps, contre les carences de continuité en prêtant attention à ce l’on fait. En se reconnectant à nous-même, nous saurons choisir entre l’urgent (répondre à mes mails, si je ne fais pas, j’aurais des ennuis) ou entre l’important (me balader dans la nature, si je ne le fais pas, je n’aurais pas d’ennui dans l’immédiat). Méditer permet de contrecarrer la dictature de l’urgence. « Une fois que l’homme s’est procuré l’indispensable, il existe une autre alternative que celle de se procurer les superfluités ; et c’est de s’aventurer dans la vie présente » Thoreau.
12. Agir et ne pas agir
Permettons à nos actes de n’être « rien que » ce qu’ils sont ! Manger quand vous mangez, marcher quand vous marchez. Arrêtons de tout faire en pleine absence ! La présence mentale à l’action nous permet enfin de mieux comprendre à quel moment une action est ou non utile. Apprenons à notre esprit à respirer entre deux actions, à désobéir à nos impulsions. La non-action est la respiration de l’action.
13. Affuter son esprit
Lorsqu’une réalité contredit une croyance, on peut chercher à assimiler la réalité pour la faire cadrer avec sa croyance, ou chercher à accommoder sa croyance pour intégrer le réel. La méditation est une rencontre sereine avec la réalité, telle qu’elle est !
14. Comprendre et accepter ce qui est
« Acceptez ! Car il n’y a rien d’autre » Swâmi Prajnânpad. L’acceptation est le degré supérieur du lâcher prise. Un accueil par le oui, sans résignation ou renoncement. L’acceptation comme une sagesse : on ne nie pas les aspects douloureux de l’existence mais on leur fait une place. Accepter, c’est s’enrichir et laisser le monde entrer en nous. C’est à la fois choisir tout et ne rien choisir.
« Celui qui voit le moment présent voit tout ce qui s’est produit de toute éternité et ce qui se produira dans l’infinité du temps ». Marc Aurèle
15. Se libérer de ses prisons mentales
La souffrance tend à devenir le centre de gravité de notre conscience au point que l’espace de notre conscience soit complètement occupé par elle. En s’accrochant à nos souffrances, nous les solidifions. Pour empêcher notre esprit de se faire polariser par la souffrance, nous devons donner plus d’espace à la souffrance pour s’en désengager. « Vous ne pouvez empêcher les oiseaux de la tristesse de voler au dessus de vos têtes, mais ne les laissez pas faire leur nid dans vos cheveux. » Proverbe chinois Entrainons nous sur nos petites souffrances. Tout passe, rien ne dure…
16. Lâcher prise
Lorsque vous marchez dans l’eau sur un plage, des petits nuages de sable se soulèvent. Pour que l’eau redevienne claire et stable, il n’y pas d’autre solution que d’attendre qu’ils retombent. Pour les nuages de l’esprit, c’est pareil : là où la rumination solidifie nos pensées désagréables, la pleine conscience les ramollis. Respirer et lâcher prise.
17. Rester présent au monde
Agrandir le contenant de notre esprit pour élargir l’espace de notre conscience pour inviter tous les bouts de vie qui passent à notre portée. Respirer, ressentir, exister sans bloquer sa respiration pour ne pas bloquer sa vie autour de la tristesse. Travailler sur les petites souffrances permet de se préparer au fracas des grandes.
18. Avancer même blessé
Comme certaines blessures physiques, certaines blessures de l’âme peuvent être là pour toujours. Il ne s’agit pas de faire disparaître la souffrance, mais de ne pas se laisser altéré par elle. La pleine conscience nous aide à placer nos inquiétudes ou découragements dans un espace plus grand. Ouvrir en grand portes et fenêtres du mental pour avancer jusqu’au refuge où tout est parfait.
19. Consentir au mystère
Quelque soit l’horreur d’une situation vécue, ne renonçons pas à notre humanité en restant capable de tourner notre esprit vers ce qu’il y a aussi de beau. La seule chose à faire dans l’adversité et le chaos est de rester dans l’instant présent et de se libérer de la pression de la solution.
20. Voir émerger doucement le bonheur
« A chaque seconde nous entrons au paradis ou bien nous en sortons ». Christian Robin. Sans conscience pas de bonheur. Même dans la tristesse, arrêtons nous et consentons à de tout petits bouts de bonheur. Prendre conscience de petits instants de bonheur permet de les agrandir, de passer à autre chose. L’enjeu n’est pas de les retenir mais de les savourer.
« Aujourd’hui, ton corps est plus vrai que ton âmes ; demain, ton âme sera plus vraie que ton corps ». Gustave Thibon
21. Travailler
Il ne s’agit pas de contrôler notre mental mais de juste d’établir un équilibre des forces : pouvoir se calmer aux moments où nous en avons besoin. Notre cerveau comme notre corps à besoin d’entraînement. Derrière la simplicité de la pratique se cache la difficulté de la régularité, le renoncement à vouloir un effet immédiat, et à ce que la pratique soit une garantie systématique.
22. Contempler
Travailler sur le détachement, c’est se détacher des souffrances, mais aussi des artifices, célébrations, et glorioles diverses. En cessant de se confondre avec ces actes, on percevra qu’il y a plus intéressant au delà. Pensons notre vie en terme d’expériences qui nous construisent au delà des mots et d’explications, dans lesquelles nous n’avons qu’à nous y laisser baigner.
23. Aimer
Une foule de gens m’ont aimé ou aidé, continuent de le faire et le feront demain. Trois démarches dans la gratitude : reconnaître l’importance de la dette, s’arrêter pour plus qu’y penser en se réjouissant et en la laissant se répandre dans tout son être, et puis l’exprimer. Ce qui nous est demandé est plus que des pensées de compassion mais des émotions de compassion.
24. Expérimenter l’extension et la dissolution de soi
La pleine conscience est comme une extension de soi, une sortie de soi-même avec l’impression de se répandre partout autour de soi. Les distinctions entre le soi et le non-soi deviennent absurdes, inutiles et encombrantes. Se préparer doucement à revenir d’où on vient, comme la vague qui se dissoudra bientôt dans l’océan, sans limites, qu’avec du lien.
Laurence de Vestel
Né à Montpellier en 1956, Christophe André est le fils d’un marin et d’une institutrice, ce qui expliquerait selon lui, son goût pour les profondeurs et pour la pédagogie. Très tôt, il lit l’œuvre de Freud et décide de faire médecine pour devenir psychiatre.
Christophe André passe sa thèse de doctorat en médecine à Toulouse en 1980, puis son mémoire de psychiatrie en 1982. Depuis 1992, il exerce à l’hôpital Sainte-Anne à Paris, au sein du service hospitalo-universitaire de santé mentale et de thérapeutique. Il est spécialisé dans la prise en charge des troubles anxieux et dépressifs, et tout particulièrement dans le domaine de la prévention des rechutes. Christophe André est l’un des chefs de file des thérapies comportementales et cognitives en France, et a été l’un des premiers à introduire l’usage de la méditation en psychothérapie. Chargé d’enseignement à l’université Paris X, il est auteur de nombreux livres de psychologie à destination du grand public dont entre autre : « Méditer pour ne plus déprimer », « Imparfaits, libres et heureux », « Pratique de l’estime de soi », « Méditer jour après jour, en 24 leçons », « Et n’oublie pas d’être heureux ».
Jean-Christophe Seznec
Alexandre Jollien
Alice Miller